Le sel de nos larmes – Ruta Sepetys

seldenoslarmesLe sel de nos larmes, Ruta Sepetys, édition gallimard, 2016, 464 pages. 

Résumé : Hiver 1945. Quatre adolescents. Quatre destinées. Chacun né dans un pays différent. Chacun traqué et hanté par sa propre guerre.
Parmi les milliers de réfugiés fuyant à pied vers la côte devant l’avancée des troupes soviétiques, quatre adolescents sont réunis par le destin pour affronter le froid, la faim, la peur, les bombes… Tous partagent un même but : embarquer sur le Wilhem Gustloff, un énorme navire promesse de liberté…

Mon avis :

Les romans historiques, ce n’est pas trop mon truc habituellement. Je ne suis pas réfractaire à ce genre, mais je n’en raffole pas et j’en lis très peu. Sans le prix littéraire des chroniqueurs web, je ne me serais certainement pas lancé dans ce livre. Toujours est-il que Le sel de nos larmes est vraiment captivant et émouvant. Il donne envie d’en lire plus. C’est-à-dire qu’il me donne envie de relire cette autrice, mais aussi de me pencher sur d’autres livres ayant une dimension historique.

Une histoire méconnue de la seconde guerre mondiale

Vu l’époque, je m’attendais à autre chose, et j’ai découvert tout un pan de l’histoire oublié. Cela m’a d’abord interpellée. La carte en début de livre a de suite suscité mon intérêt. L’histoire nous conte le destin de quatre adolescent fuyant la Prusse orientale, à pied (avec des chariots pour les plus chanceux, car les véhicules avaient été réquisitionnés par l’armée). Le but étant de rejoindre un des ports, séparés de la Terre par une lagune gelée qu’il fallait traverser. Ceux qui ont réussi ces épreuves devaient ensuite embarquer sur un des navires, et il n’y avait pas de place pour tout le monde. L’un d’eux a fait le plus gros naufrage de l’histoire, et personnellement je n’en avais jamais entendu parler. A une époque, j’adorais lire des livres sur la seconde guerre mondiale qui mettaient souvent en exergue la souffrance du peuple juif et les camps de concentration. J’étais toujours très émue et horrifiée, mais j’avais une vision assez restreinte de cette guerre du coup. C’est la première fois que je lis un livre sur la migration de ces peuples pris dans les tourments de la guerre. L’autrice a fait des années de recherche, visité une demi-douzaine de pays, récolté de nombreux témoignages, et ça se sent. C’est réaliste, sans être lourd de détails historiques. Elle nous propose un récit immersif.

Une fiction captivante

« Une fois les survivants disparus, il ne faut pas laisser la vérité disparaître avec eux » nous dit l’autrice à la fin, et c’est vrai qu’elle a rétabli une vérité avec cette histoire. Cela dit, c’est bien un roman et non un témoignage. Outre son thème très intéressant, je l’ai trouvé captivant, et j’ai su m’attacher aux personnages en dehors d’Alfred, seul personnage détestable de ce quatuor (mais c’est voulu). En fait, il m’a plus fait pitié qu’autre chose, c’est un jeune allemand qui désire devenir un héros de guerre et soutient les idées d’Hitler, allant même jusqu’à réciter la liste de tous les ennemis du Reich en chanson. J’ai tout de même aimé suivre ce personnage détestable. Les autres personnages courageux et altruistes sont beaucoup plus attachants, et on espère tout du long qu’ils vont survivre à ce voyage.

Qu’étaient donc devenus les êtres humains ? La guerre nous rendait-elle mauvais ou bien se contentait-elle d’activer un mal tapi au fond de nous depuis la nuit des temps ?

Nous les suivons depuis leur marche à pied, avec un groupe de personnages secondaires dont certains sont également très attachants comme le petit Klaus, Ingrid qui doit masquer son handicap et le cordonnier… D’autres le sont un peu moins, comme Eva qui n’est pas foncièrement méchante mais qui est individualiste. En dehors des faits, nous avons tout un panel de personnages. Tout nous y est dépeint : la solidarité, l’individualisme, la folie, le désespoir, mais aussi l’espoir. Bref, une aventure humaine dont on ne sort pas indemne.

Et malgré la date de cette histoire, on ne peut s’empêcher de penser aux mouvements de populations actuels… L’écriture est très fluide rendant la lecture agréable, mais l’autrice ne nous épargne pas l’horreur avec des passages chocs. Malheureusement, tout cela n’est pas derrière nous.

Le navire partait enfin.

Je jetai un coup d’œil à travers le joint d’acier pour le regretter aussitôt. La scène qui se déroulait en contrebas était effrayante. Je n’avais jamais assisté à pareille détresse. Ceux qu’on avait laissés sur les quais tentaient désespérément de monter à bord. Ils avaient le visage déformé tant ils criaient, pleuraient, imploraient.

Des mères tentaient de lancer leurs nourrissons aux passagers sur le pont, mais elles ne parvenaient pas à les lancer haut. Leurs bébés allaient s’écraser contre le flanc du navire avant de sombrer dans la mer.

En bref, vous l’aurez compris. Je vous conseille cette histoire captivante basée sur un fait historique méconnu. 

prixlitte


22 réflexions sur “Le sel de nos larmes – Ruta Sepetys

  1. Le dernier extrait fait froid dans le dos :’-( Je ne lis plus beaucoup de romans historiques, mais j’ai eu une période où j’étais fasciné par tous les récits sur la seconde guerre mondiale. Ta chronique me donne envie de découvrir ce roman…

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    1. J’avoue que je l’ai emprunté, car je lis peu de romans historiques et j’étais un peu septique. Mais je ne regrette pas, et j’espère que tu auras l’occasion de le lire un jour 🙂

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