Magma – Thora Hjörleifsdóttir,

Magma, Thora Hjörleifsdóttir, éditions Agullo, 2024, 144 pages

» L’amour est un spectre. Il est aussi douloureux que bon. »

Résumé éditeur : Avec Magma, Thóra Hjörleifsdóttir ne raconte par seulement l’histoire de Lilja : c’est aussi celle de toutes les femmes qui, comme elle, sont prisonnières d’une relation toxique. Il faut peu de mots à l’autrice, parfois même un chapitre d’une seule phrase, pour décrire la violente descente aux enfers de la jeune fille que nous suivons, plongés dans un pathos presque poétique.
À l’heure où la parole des femmes se libère, Magma, premier roman de l’autrice, est un texte qui déchire tout autant qu’il donne espoir à toutes celles qui ne savent pas comment échapper à l’emprise de la brutalité. Hjörleifsdóttir communique en effet la dure réalité dont beaucoup n’osent pas parler par peur qu’on ne les croit pas, car » si nous ne brisons pas le silence, l’histoire continuera à se répéter « .

C’est un livre que j’avais repéré à sa sortie et que j’ai demandé lors d’une opération masse critique.

Je suis contente de l’avoir lu, mais mon avis est finalement plutôt mitigé.

En termes d’expérience de lecture, le livre est fait de courts chapitres que j’ai enchainé à un rythme effréné. Je l’ai lu d’une traite. Toutefois, je l’ai refermé avec un sentiment étrange que je vais essayer de décrypter sans trop spoiler.

Ecrit à la première personne, il nous raconte l’histoire d’une jeune femme qui a vécu l’emprise. Je ne sais que penser de ce livre… De toute évidence, il était prenant, mais… même s’il y a quelques belles phrases, j’en attendais davantage de ce thème.

Là, j’ai plus eu l’impression de lire une compilation de red flags, car on se rend compte très rapidement qu’il s’agit d’une relation toxique. Parfois c’est raconté avec justesse, parfois on se dit que c’est trop… M’enfin, c’est possible qu’un homme soit ainsi, mais vu ce qu’il fait, le red flag est vraiment visible donc j’ai eu l’impression que ça manquait de subtilité. J’avais lu une histoire jeunesse sur le même thème que j’avais vraiment aimé, notamment pour cette subtilité (lu en 2017 : Passionnément, à ma folie). J’aurais aimé que le lecteur s’interroge, et je pense que le début est un peu fait pour ça (la narratrice a eu de nombreux partenaires et j’ai trouvé ça intéressant, c’est ce qui manquait dans le roman jeunesse où la victime était parfaite), mais la progression est très rapide. C’est parfois très cru. Cela en est fascinant : on se demande ce qu’on apprendra sur leur relation au chapitre suivant et les pages se tournent sans qu’on puisse poser le livre… mais il m’a manqué un truc pour que ça soit marquant durablement. Dans ce genre de récit, je pense que j’aurais préférée être perturbée par la personnalité du mec, être prise au piège, mais on est plus dans la situation d’un.e ami.e qui voit directement le problème et assiste impuissant.e à la descente aux enfers de Lilja. Les premiers symptômes d’abus, qu’on est censé avoir du mal à identifier, on les voit rapidement. C’est avec cet effet « catalogue » que j’ai eu du mal.

C’est peut-être voulu, et peut-être culturel aussi ? C’est un texte qui a suscité de nombreux débats en Islande. Tout dépend peut-être des informations que détient le lecteur ou la lectrice avant lecture. Ai-je déjà trop lu sur le sujet ? Si on s’arrête aux détails, il est vrai que le livre pourrait être un support pour aborder différents sujets.

Outre la relation toxique, le livre aborde d’autres thèmes comme la banalisation de la pornographie et ce que cela fait à la narratrice. C’est intéressant, car les injonctions viennent de l’homme mais aussi de la société qui par la normalisation de certaines pratiques brouille le consentement, la jeune femme ne refusant pas des pratiques qui la font pleurer et la dégoute. Elle veut être à la hauteur pour lui. Passage assez violent. Pour le coup, il s’agit d’un thème assez peu abordé il me semble.

EXTRAIT : « Il m’a effeuillée comme un oignon. Cernée de lambeaux de peau, je ne suis plus rien et mes yeux me piquent. »

Je ne peux pas en parler, mais je n’ai pas vraiment aimé la fin. Je trouve qu’elle laisse un goût amer.

En bref, je ne pense pas que cette lecture me laissera un souvenir marquant, mais je suis contente de l’avoir lu. J’attendais plus de subtilité dans la progression de la relation. Ce rythme intense et rapide a été à double tranchant pour moi. Prenant, mais retombant comme un soufflet. Je pense qu’il séduira davantage d’autres lecteurs et lectrices. Une bonne lecture tout de même.